Les implications des hauts potentiels sur le plan scolaire
Les jeunes à hauts potentiels apprennent vite mais ils apprennent surtout différemment des autres enfants.
Dans la littérature ils sont souvent qualifiés d’autodidactes, aimant découvrir une matière ou un sujet seul et à leur façon. Cette autonomie leur permet de faire face à leur soif d’apprendre, est présente dès le début de leur vie et mène souvent à des apprentissages précoces dans des domaines tels que la lecture, les mathématiques, le langage, etc.
Bien entendu, il existe chez ces jeunes, tout comme dans la population générale, une grande diversité de profils et de façon d’apprendre. Néanmoins, les études réalisées sur le sujet mettent en évidence certaines manifestations types dont voici quelques exemples :
- le jeune à hauts potentiels apprend rapidement et de ce fait aime peu les activités répétitives et/ou d’application ;
- il préfère de loin les démarches de recherches et présente un apprentissage intuitif, global, sans étape ni référence à un modèle prédéfini ;
- il est attiré par les apprentissages complexes et peut paradoxalement se retrouver démuni face à des tâches simples à réaliser ;
- il aime l’abstraction mais présente des difficultés d’organisation du travail, la gestion du matériel et du quotidien est souvent difficile ;
- il a une excellente mémoire mais rechigne face aux activités de mémorisation particulièrement lorsqu’elles sont imposées ;
- il comprend vite, ce qui lui donne le sentiment de connaître un sujet ou une matière alors que cela n’est pas toujours le cas.
Ces caractéristiques ont de multiples conséquences :
Positives d’une part, parce qu’elles permettent un traitement et une compréhension de l’information en profondeur, elles amènent également ces jeunes à avoir une pensée originale et créatives, source d’idées nouvelles et de découvertes.
Négatives aussi, parce que l’école est loin de privilégier ce type de fonctionnement et qu’ils peuvent alors être « handicapés » dans leur scolarité. En effet, les jeunes vont la plupart du temps se retrouver dans un contexte scolaire peu stimulant à leurs yeux, ou exploitant trop peu leurs potentiels, ils peuvent alors développer plusieurs types de réactions :
- certains vont mettre en place des stratégies qui vont leur permettre de se conformer au système scolaire et investiront leur énergie ailleurs, dans des activités extra-scolaires par exemple ;
- d’autres, acceptant plus difficilement le système scolaire développent des comportements indisciplinés voire provocants envers leur professeur ;
- d’autres encore, désinvestissant peu à peu les apprentissages scolaires, se retrouvent progressivement incapables de mobiliser leurs ressources et peuvent entrer dans une spirale d’échec ;
- enfin certains développent une opposition au système et décrochent.
Les jeunes s’adaptant difficilement aux méthodes et au système scolaire n’obtiennent souvent que des résultats faibles ou moyens et ce malgré leurs potentiels. Pourtant, le mythe du « surdoué » premier de classe est encore bien présent.
Les réactions de rejet ou d’ouverture de l’école sont à cet égard d’une importance capitale car elles peuvent aider le jeune soit à s’adapter avec des moments d’ennui, soit à s’exclure et à décrocher…
Des possibilités pédagogiques diverses au sein même des établissements
Certains jeunes à hauts potentiels peuvent parfois trouver une voie qui leur convient au sein d’établissements qui se démarquent par une pédagogie moins « traditionnelle » comme :
- les écoles organisées autour de projets spécifiques ;
- les écoles proposant des pédagogies actives (un guide reprenant l’ensemble de ces écoles est disponibles au SIEP – http://www.siep.be/publication.html ;
- les écoles proposant une immersion linguistique ; (lien vers la page du site enseignement.be qui propose une liste des écoles qui organise l’immersion en primaire ou en secondaire) ;
- les écoles permettant des assouplissements d’horaire sous forme, par exemple, de modules optionnels ;
- les « petites écoles de village » proposant des classes regroupant plusieurs années de la scolarité : certains jeunes à hauts potentiels peuvent trouver une solution adéquate dans cette formule leur permettant une avancée dans le domaine intellectuel, tout en côtoyant des enfants de leur âge, etc.
On peut également noter que certains enseignants (et/ou établissements) parviennent à trouver des « solutions pédagogiques » qui peuvent être très bénéfiques aux enfants à hauts potentiels (comme à tous les enfants d’ailleurs) :
- la mise en place d’une pédagogie différenciée ;
- les mesures d’accélération qui peuvent consister en une modification du rythme d’acquisition de certaines matières ;
- les mesures d’enrichissement qui consistent à donner accès à un plus grand nombre d’informations, différentes ou complémentaires à la matière vue en classe. Ces mesures n’en restent pas à une accumulation disparate de connaissances, le plus souvent, elles permettent ensuite la réalisation d’un projet ou d’une synthèse qui a du sens pour l’enfant ;
- les mesures d’approfondissement organisées ponctuellement pour les élèves en demande. Ces mesures ont pour objectif de permettre aux enfants de creuser certains domaines en profondeur en fonction de leurs intérêts. On leur fournit alors un complément pédagogique dans une ou plusieurs des matières enseignées ;
- l’incitation à la participation à des activités ouvertes et de créativité ;
- les modifications dans la manière de présenter ou d’aborder certains contenus (on met alors l’accent sur l’abstraction, sur les défis, sur une étude des différentes techniques ou méthodes possibles, …) ;
- la mise en place d’activités de tutorat ;
- la mise en place de projets de recherche propres à l’enfant, projets qui seront ensuite présentés à la classe ;
- la mise en place de projets de classe.
- etc..
Peut-on envisager une accélération du parcours scolaire ?
Les solutions possibles …
Une première possibilité d’accélération consiste à débuter l’enseignement primaire avant l’âge légal d’obligation scolaire. La période d’obligation scolaire s’étend sur douze années, commençant avec l’année scolaire qui prend cours dans l’année pendant laquelle l’enfant atteint l’âge de 6 ans. Toutefois, l’élève peut, après avoir obtenu l’avis de l’école et du C.P.M.S. associé, fréquenter la première année de l’enseignement primaire dès l’âge de 5 ans.
Une autre possibilité d’accélération réside dans le saut de classe. Cette solution a pour objectif de mieux respecter le développement intellectuel de l’enfant à hauts potentiels et d’éviter ainsi l’ennui en classe, facteur d’échec le plus déterminant. L’enfant devrait alors être confronté à des tâches qui correspondent mieux à ses potentialités. Le saut de classe est légalement possible au niveau de l’enseignement primaire. Il n’est actuellement pas permis dans l’enseignement secondaire.
Le saut de classe n’est évidemment pas une solution adéquate pour tous les jeunes à hauts potentiels. En effet, cette mesure peut présenter plusieurs inconvénients.
Dans un premier temps, notons qu’elle ne répond qu’au besoin d’accélération du rythme scolaire. Comme déjà souligné plus haut, les enfants à hauts potentiels apprennent non seulement plus tôt et plus vite que les autres enfants, mais ils apprennent surtout différemment.
De plus, l’accélération du rythme des apprentissages n’est pas toujours une mesure adéquate puisque l’enfant n’est pas nécessairement en avance dans tous les domaines. En effet, de très grandes capacités dans un domaine peuvent coexister chez un individu avec d’autres ordinaires, voire médiocres.
Par ailleurs, un saut de classe risque de conduire l’enfant à ne pas maîtriser suffisamment ou au bon moment l’ensemble des matières de l’année « sautée ». Les classes à double et triple niveau ou les classes uniques offrent ici un intérêt particulier. En effet, l’élève plus rapide peut assimiler le programme à son rythme tout en passant par l’ensemble des étapes.
Finalement, une telle mesure contraint l’enfant à s’adapter à un groupe d’élèves plus âgés. Il doit alors faire preuve d’une maturité suffisante pour faire face aux nouvelles exigences intellectuelles et sociales. Il peut y avoir un grand écart au niveau du développement physique, affectif et émotionnel entre l’élève avancé et les autres élèves de sa classe.
Malgré ces différences, il est toutefois possible que l’intégration se passe bien et que le jeune fasse preuve d’une excellente adaptation à son nouvel environnement social. On peut donc imaginer deux conditions de facilitation. D’une part, plusieurs enfants peuvent parfois effectuer en même temps leur démarche accélératrice et se retrouver ensemble dans une classe d’élèves plus âgés ; ils partageront ainsi certains intérêts plus apparentés et ceci pourra faciliter leur adaptation. D’autre part, comme ce type de décision se prend rarement dans un contexte d’urgence, il peut-être avantageux de profiter du passage de l’enfant au cycle d’enseignement suivant, surtout lorsque celui-ci implique un changement d’école et la constitution d’un nouveau groupe d’amis ; l’impact socio-affectif de l’accélération pourrait alors s’en trouver atténué.
Existe-t-il des écoles spéciales ?
En Belgique francophone, il n’existe aujourd’hui aucune école spéciale pour enfants à hauts potentiels. La création de telles structures n’est d’ailleurs pas envisagée à l’heure actuelle, la politique visée étant celle de l’intégration.
Des expériences de ce type sont réalisées dans d’autres pays. En France, c’est notamment le cas du Lycée Michelet (à Nice) qui a créé en 1987 une classe pilote pour enfants précoces. Les enfants peuvent y être acceptés dès 5 ans, voire plus tôt encore. L’objectif de l’école est de permettre aux jeunes une meilleure expression de leurs possibilités intellectuelles et, en conséquence, une réussite scolaire et un épanouissement personnel plus satisfaisants. L’école souhaite aider ces enfants dans le respect de leur personnalité et de leur diversité d’aptitudes. L’option prise est l’enrichissement du cursus au travers d’activités très intenses. Il est à noter qu’en France certaines critiques sont émises à l’égard de ce genre d’établissements selon lesquelles ils relèveraient davantage de la politique commerciale de démarchage des parents que de préoccupations d’ordre pédagogique.
En Suisse, l’école Nees propose quant à elle une approche basée sur les spécificités et les besoins des jeunes sur le plan des apprentissages, chacun y avance à son rythme et les activités créatrices et philosophiques occupent également une large place.
De nombreuses initiatives d’écoles ou de classes réservées aux jeunes à hauts potentiels sont également apparues dans les pays anglo-saxons, en Suisse, en France…C’est également le cas en Flandres où il existe une classe appelée classe « Kangouroe », reservée aux jeunes à hauts potentiels ;cette classe propose une accélération du cursus pour les matières du programme et permet ainsi de libérer du temps pour d’autres approches pédagogiques : recherches personnelles, visites, activités créatrices, etc..
En Belgique francophone, plusieurs expériences ont été tentées mais ne sont plus poursuivies à l’heure actuelle ; néanmoins certains établissements restent sensibles à l’intégration des jeunes à hauts potentiels.
Le regroupement des enfants à hauts potentiels en classes spéciales a ses partisans et ses détracteurs. Des associations nationales et internationales militent notamment en leur faveur. Malgré la louable volonté de viser un épanouissement complet de l’enfant, il faut reconnaître que le danger encouru par un tel fonctionnement est la marginalisation de l’enfant et, par la suite, le risque d’une non-intégration harmonieuse dans la société hétérogène qui est la nôtre.
Une scolarité à domicile est-elle possible ?
L’obligation scolaire ne signifie pas que l’élève est tenu de fréquenter l’école. Une scolarité à domicile est en effet possible, par exemple grâce aux possibilités offertes par l’enseignement à distance.(e-learning).
Cet enseignement est organisé en Belgique et régi par un arrêté du Gouvernement. L’inscription est libre à n’importe quel moment de l’année. Un conseiller d’orientation de l’EAD examine toute demande d’inscription relative à la préparation d’un jury afin de veiller à l’adéquation entre le niveau initial du candidat et le programme de formation demandé.
Il propose des itinéraires de formation en tenant compte, d’une part, du profil scolaire de l’apprenant au moment de l’inscription et, d’autre part, des objectifs de formation de celui-ci. L’enfant bénéficie donc d’un programme personnalisé en fonction de ses objectifs, de son acquis scolaire, de sa maturité personnelle et du temps dont il dispose. Chacun peut ainsi travailler à son rythme. Chaque unité de matière s’accompagne d’un travail à renvoyer, corrigé par un professeur qui suit l’évolution de l’enfant tout au long de son apprentissage.
La scolarité à domicile donne ensuite lieu à une certification externe, via le passage du certificat d’étude de base à la fin des études primaires (Notons que ce n’est plus obligatoire à l’heure actuelle mais nécessaire pour rejoindre l’école secondaire.) et via le passage du jury pour les différents niveaux du secondaire.
Précisons immédiatement que même si une scolarité à la maison est possible en Belgique, elle n’est toutefois pas une solution idéale. En effet, les enfants ainsi scolarisés risquent fort de grandir dans l’isolement, sans avoir l’occasion de se confronter quotidiennement à leurs pairs en situation d’apprentissage. Ils pourront développer une solide armure intellectuelle, mais il leur manquera l’aspect social qui est un constituant important de la personnalité et de l’intégration socioprofessionnelle future.
De plus, ce type de scolarité demande une grande disponibilité (et de grandes compétences) de la part des parents. Par ailleurs, les enfants deviennent en grande partie responsables de la gestion de leur temps de travail et ceci engendre un risque de voir apparaître une négligence des matières qu’ils apprécient moins. Une scolarité suivie entièrement à la maison peut donc engendrer de nombreuses difficultés et rendre plus difficile l’intégration sociale ; elle doit donc rester une solution passagère en cas de crise grave.
Cette formule peut également être utilisée parallèlement à une scolarité « normale », sous forme de modules, permettant ainsi un approfondissement dans l’une ou l’autre matière particulièrement prisée par l’enfant ou un enrichissement par la découverte d’une matière ne figurant pas au programme.
Tous les renseignements concernant les cours organisés et les modalités pratiques peuvent être obtenus sur le site de l’enseignement à distance.
Les jurys de la Fédération Wallonie-Bruxelles
Une des manières d’adapter la scolarité des jeunes à hauts potentiels est d’accélérer le cursus, or, le saut de classe n’est pas permis dans le secondaire… Il est possible de contourner ce fait ou dans d’autres cas, de rattraper une année perdue en passant par les jurys de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Ces jurys sont organisés et certifient la réussite à la fin de chaque degré du secondaire. Il existe une série de conditions pour pouvoir s’y inscrire, notamment au niveau de l’âge, vous pourrez retrouver toutes les infos ici.
Même s’ils sont une alternative intéressante, il faut tenir compte du fait que présenter un examen au jury central n’est pas simple et demande beaucoup d’étude et de préparation. Il est donc difficile de présenter ce jury en parallèle d’une scolarité normale. Il est par contre envisageable de le préparer à domicile à l’aide des cours à distance ou de fréquenter une école spécialisée dans la préparation aux jurys centraux. Une telle école présente l’avantage de bien connaître les programmes et le type d’évaluation des jurys ; elles permettent également au jeune de rester en contact avec d’autres jeunes, néanmoins ces écoles sont presque toutes privées et coûteuses.
Pour toute autre information sur les différents jurys organisés en Fédération Wallonie-Bruxelles, nous vous invitons à vous rendre sur le site internet de ceux-ci.
Et concrètement, comment faire ?
Lorsque l’accélération du cursus est envisagée comme une solution opportune pour un enfant, il existe certaines démarches, soumises à des dispositions légales qu’il est nécessaire de respecter. Au delà de celles-ci, rappelons que l’aide et l’avis des professionnels éducatifs qui entourent l’enfant sont des éléments essentiels et contribuent à réussite de la mise en place de ces mesures.
Plusieurs cas de figure peuvent se présenter :
Lors d’une entrée précoce dans l’enseignement primaire, il existe une loi qui définit de façon précise les conditions et procédure à suivre.
Concrètement, l’enfant doit être âgé de 5 ans au moins. Il est ensuite nécessaire qu’il reçoive l’avis du centre PMS qui est attaché à l’école. Notons cependant qu’il doit être pris à titre consultatif : cet avis est donc obligatoire mais n’a pas le pouvoir d’empêcher une entrée précoce en primaire. L’école doit elle-aussi être d’accord d’accueillir l’élève en 1ère primaire.
Lorsqu’un saut de classe est envisagé en cours de scolarité primaire, il n’y a pas de procédure qui soit exigée légalement, la décision est donc prise d’un commun accord entre l’école et les personnes qui sont responsables du jeune. Toutefois, même s’il n’est pas obligatoire, l’avis des professionnels nous semble nécessaire pour prendre une décision sensée.
A la fin des études primaires, les élèves obtiennent leur certificat d’études de base (CEB) lors de la réalisation d’un examen. Parfois, il est envisagé qu’un enfant passe cet examen à l’issue de sa cinquième année primaire, ce qui lui permet, sans avoir quitté son groupe-classe jusque là, d’entrer anticipativement en secondaire. Pour présenter l’épreuve du CEB dans l’enseignement primaire, une des deux conditions doit être respectée :
- l’enfant doit être inscrit en sixième primaire ;
- l’enfant doit être âgé de 11 ans au 31 décembre de l’année civile de l’épreuve.
Par exemple, pour présenter l’épreuve de juin 2012, l’élève doit avoir au moins 11 ans au 31 décembre 2012. Si l’élève ne remplit pas cette condition, il faut envisager un passage de classe en cours d’année afin que le jeune soit inscrit légalement en sixième primaire lors de l’inscription à l’examen. Cette inscription dans l’année supérieure est possible jusque tardivement dans l’année scolaire. Cette mesure devra donc être organisée d’un commun accord avec l’école.
Lorsqu’une accélération est envisagée en secondaire, il est indispensable de passer par les jurys de la Fédération Wallonie-Bruxelles, vous trouverez les informations nécessaires à ce sujet dans la rubrique qui leur est consacrée.